Téhéran
Lieu de la révolte et du pouvoir, ancien et moderne, pénétrer Téhéran est comme plonger dans un puits hurlant de cris automobiles et de rumeurs urbaines. Les bâtiments, modernes, se déroulent selon un plan dense et géométrique et l’on peine à circonscrire quelque espace pour se repérer. Les déplacements sont soumis au bon vouloir des taxis qui tissent dans Téhéran une toile anarchique, au désordre apparent.
Les belles Paykan (modèle de voiture le plus commun) aux profils géométriques, dévorent 17 litres/100 et dégagent une belle et dense fumée noire!
Le sud de la ville, ancien et populaire, abrite un immense bazar et une foule de petits commerces. L’habitude de rassembler les boutiques par corporation, observée depuis la Turquie, se vérifie ici, et chaque produit se décline dans ses moindres développements, transformant le consommateur en explorateur d’une caverne miraculeuse. Nous nous perdrons dans ce dédale où travaillent 300 000 personnes …une ville à l’intérieur de la ville. Téhéran grouille de ses 7 millions d’habitants (intra-muros ; 14 millions avec la banlieue).
Homayoun, artiste peintre ayant fait ses études à Paris, nous prête son atelier comme point de chute. Nous sommes dans les quartiers Nord. Pénétrer son antre où transparaît la sensibilité iranienne nous ouvre d’autres portes. Homayoun est professeur à l’université d’art plastique, la rencontre de ses collègues, épris de culture française et européenne renvoie à un sentiment d’humilité.
Nous découvrons Téhéran sous la pluie.
Beau temps pour l’Iran qui souffre d’un manque d’eau endémique! L’eau précieuse est captée, et ce depuis des millénaires, grâce à des systèmes très ingénieux : fonte des neiges récupérée par des canaux qui alimentent le cœur des villes (oui, la neige est très présente en Iran, l’ensemble du pays culminant à une moyenne de 1000 voire 1200m d’altitude avec des sommets à 1600m), nappes phréatiques pompées grâce à des systèmes de puits et de forages aussi anciens qu’ingénieux.
La brume pluvieuse mélangée aux fumées des voitures filtre nos photos qui resteront pour l’instant dans nos archives.
Une visite du palais du Golestan ayant appartenu à la dynastie des QADJAR (XVIIIeme siècle) et dont le dernier shah exploita le luxe, nous éblouit par l’opulence de ses salons.
Nous quittons Téhéran, las de l’étouffement qui saisit mais fascinés et heureux d’avoir touché du doigt le point névralgique du pays.
Kâshân
Une ville qui porte en propre dans la sonorité de son nom bien des richesses cachées. Ville étape caravanière sur la route de la soie, elle fut un oasis prospère. Aujourd’hui, il faut dépasser les villas prétentieuses de la banlieue, traverser le centre-ville moderne aux constructions hétéroclites pour rejoindre le cœur de la ville ancienne resté intact.
Les pans de murs ocre rouge, mats, offrent ce velouté que seule la terre mélangée de paille peut offrir.
La ville était opulente, des familles patriciennes y construisirent de fabuleuses villas. Nous voici au pays des Contes des mille et une nuits.
De l’extérieur, rien d’ostentatoire, un modeste portail de bois oblige à se courber. A l’intérieur, un enchevêtrement complexe de pavillons, salons, cours, atrium… distribués sur plusieurs niveaux creusés perpendiculairement. Le cœur souterrain et frais de la villa inquiète par sa pénombre. Remontant vers la lumière les bassins, les fontaines, s’animent. Les fenêtres ouvragées tressent des rayons colorés qui rebondissent sur les décors des murs en staff ocre, creusés en méplat. Plantes luxuriantes, oiseaux, soleils, arabesques… On reste étourdis et charmés. Le dédale des salles, des escaliers dérobés, des terrasses, déroute nos sens en des perspectives improbables. On joue au chat et à la souris…
Nos chameaux nous attendent sur le parking d’un hôtel (nous y retrouvons par hasard, une caravane de compatriotes rencontrée à Kandovan !)
Nous partons pour Ispahan et traversons un bout du désert montagneux, superbe et dont la majesté ne saurait mieux s’exprimer que par le silence profond qui y règne.
Dans le prochain épisode nous vous parlerons d'Ispahan, de Persepolis et de Shiraz. Des histoires de canaris et de perruches, de parfums d'orangers et de jasmin, de sites archéologiques époustouflants...
Notre visa expire, nous devons quitter l'Iran. Un bateau nous attend à Bandarabas pour Dubaï.
Album photo n° 10