Oui, il nous a bien trouvé. C’était à Mersing, petite ville côtière du Sud-Ouest de la péninsule. Malgré les bourrasques de vent, la pluie fouettant les palmiers, la mer de Chine boueuse à force de remous, il a bravé les éléments pour venir nous gâter…
Noël au creux d’un monde salin, sauvage, grandiose, bien loin des clichés de la saison douce où le bleu du ciel embrasse la mer émeraude, Noël dans un cœur palpitant et la fête fut belle.
Nous avons fait voler un cerf-volant si haut dans le ciel, il fut l’étoile de notre sapin.
La mousson d’hiver frappe la côte Ouest et nous filons vers l’Est, plus épargné grâce au golfe de Melacca. Rouler à gauche est une expérience de grande vigilance, il faut aussi éviter les singes chapardeurs qui déboulent, les motards transportant femme et enfants, têtes nues, les automobilistes indolents qui bavardent et oublient qu’ils roulent… Le réseau routier de qualité permet de traverser le pays du Sud au Nord sans grande difficulté.
Côte Ouest : le temps est stable, serein, un temps idéal pour apprendre à conjuguer les verbes être et avoir!
Nous remontons la péninsule le long de cette côte Ouest, découvrant de jolies villes au patrimoine aussi riche qu’ancien. Cette région stratégique, carrefour maritime entre Inde et Chine, attira bien des convoitises.
Nous visitons Melacca, ville multiculturelle, comme la plupart des villes de Malaisie.
Ici, comme à Singapour, nous croisons des temples Indiens aux milles figures bariolées. Dans les quartiers chinois, illuminés de lanternes rouges, les temples bouddhistes célèbrent Bouddha dans « Tous ses Etats » : assis en méditation, debout hilare et bras tendus, allongé… L’Islam s’étant imposé dans le pays, les muezzins bercent encore nos nuits. Et les sons de cloches rappellent que Portugais et Hollandais y firent construire des églises.
Les Malais, « fils du pays » (ne pas confondre avec les malaisiens qui vivent sur le territoire) sont musulmans (un islam très modéré), ils ont gardé de leur culture originelle des croyances et des superstitions animistes.
Les Malais nous sourient, les Chinois nous demandent combien ça coûte et les Indiens rentrent dans notre fourgon pour visiter le carrosse.
A Melacca, nous tournons longuement autour de la reconstitution à l’échelle de cette caravelle à bord de laquelle les portugais accostèrent sur ces côtes, la « Flor di Mare ». Nous apprenons l’histoire de Cheng Ho, navigateur chinois qui aurait découvert l’Amérique avant Christophe Colomb…
Soins spéciaux pour notre Merco, lavage-vidange-révision, prêt à lécher les routes d’Asie.
Nous remontons vers la Nord et le Cyclope fête la nouvelle année sur la Route des Epices.
Arrêt à Putrajaya, capitale administrative du pays. La ville est déserte en ce long week-end chômé par tous à l’occasion de la nouvelle année chrétienne. Etrange ambiance : une ville entièrement consacrée à l’administration, des kilomètres d’immeubles de bureau flambant neuf dans lesquels la climatisation est poussée à l’extrême, aucune enseigne, aucun restaurant, rien ne rappelant les besoins vitaux des hommes.
Découverte de la capitale du pays : Kuala Lumpur. La misère y côtoie un luxe à l’occidentale. Certains coins de rue regorgent d’immondices, un dense réseau routier survole la ville, croisant ses multiples bretelles par-dessus les quartiers populaires… Autre visage : le centre touristique et son point d’attraction principal, les tours jumelles, immenses fusées de verre et d’alu dont l’esthétique rappelle nos « années 70 ». Ces tours, construites par la plus puissante compagnie pétrolière du pays, symbolisent l’ambition du pays : rester l’un des cinq « dragons d’Asie ».
La Malaisie regorge de ressources naturelles internationalement convoitées : l’étain fut exploité dès l’avènement de la boite de conserve, les forêts d’hévéa saignèrent pour produire du caoutchouc, bois précieux, pétrole, et plus récemment, les forêts primitives brûlent pour planter des palmiers dont on extrait ce poison qu'est l’huile de palme…
A KL, nous croisons Jean, Qian et Jonas autour d’un dîner chinois : soupe de porc où flottent de mignons champignons et des légumes aux saveurs inoubliables. Bye, bye !
Plus au Nord encore.
Détour vers l’Est pour savourer la fraîcheur des montagnes dans les Cameron Highlands. La route zigzague dans une forêt dense, aux essences variées, les paysages sont splendides, les varans et autre vie grouillante sont à portée de main. Les singes nous défient sans cesse, allant jusqu’à perturber nos stations-scolaires. Des papillons, un peu moins grands qu’une main et aux couleurs à faire frémir un peintre, s’enhardissent dans nos parages.
Dans toutes ces petites villes traversées, nous voyons des écoles où les enfants en uniforme nous rappellent nos obligations. Tous parlent anglais ici, et bien mieux que nous. C’est vrai que le malais n’est pas une langue très compliquée : pas de conjugaison, tous les verbes sont à l’infinitif, il suffit de rajouter le moment où se déroule l’action pour se faire comprendre, pas de pluriel, si vous voulez plusieurs bananes, il suffit de répéter le mot… Trop de chance !
Nous nous promenons dans une plantation de thé en compagnie d’une famille nantaise : Laurent, Sandrine et leur petit Clément. Après l’Amérique, ils sillonnent les routes d’Asie du Sud Est. RV en Thaïlande sans doute ! Ces plantations sont conçues comme des phalanstères, maisons des ouvriers (indiens pour la plupart), lieu de culte, école, et dispensaire. Sur les coteaux, les buissons de thé dessinent des volutes mousseuses où l’on découvre que le vert est une couleur aux nuances infinies.
Nous sommes à Georgetown, sur l’île de Penang, accessible par un pont routier. Nous dégustons de délicieuses brochettes de poulet servies dans des feuilles de bananier, nous dévorons des ramboutans, des dukus, et autres fruits pleins de vitamines…
La mer est toujours à portée de main sans pour autant offrir des plages qui pourraient donner envie de se baigner. Ce sera pour bientôt, quand nous aurons traversé la frontière pour ce pays que nous avons bien hâte de découvrir : la Thaïlande.
Album photo n° 18